lundi 18 octobre 2010

Retour à la terre

On dit souvent que la fantasy est à l'opposé des valeurs de la SF. Je fais partie de ceux qui pensent que ces deux littératures ont trop en commun pur être antagonistes. S'il faut trouver une littérature véritablement opposé à la SF c'est ailleurs qu'il faut chercher : le roman de terroir ou roman paysan. Là où la SF est la littérature de l'altérité, le roman de terroir est celui du renfermement sur soi. Là où la SF est ouverte sur le futur, le roman paysan prône le retours vers le passé, celui d'un âge d'or rural mythique. Là où la Sf se veut progressiste, le roman de terroir est conservateur parfois même réactionnaire. Toutefois réactionnaire ne veut pas dire forcément de droite. Certains éditeurs régionalistes qui éditent du roman de terroir se réclament du communisme rural.
On est en droit de se demander si une certaine SF écologique des années 70 n'a pas été mal comprise par une partie du public. La figure du retours à la terre était en effet présente dans les utopies écologistes qui représentaient une bonne part du genre à l'époque. Jean Pierre Andrevon a consacré deux anthologie à cette thématique chez Denoel. Mais la société rurale figurait aussi dans les oeuvres de certains auteurs anglo saxons, par exemple Pamela Sargent. C'est quand le genre est passé à autre chose que les ventes ont commencé à baisser. Cela ne veut peut être rien dire. Mais il est clair qu'une partie du public de la SF écologique de l'époque a certainement mal compris le propos. Il a retenu l'aspect rural et non l'aspect écologique et le respect pour la nature de ces oeuvres. Il y a vu une défense de la société agraire traditionnelle, alors qu'il s'agissait de critiquer la société de consommation et ses excès.
Mais à coté de ça les années 80 ont vu le développement des certaines valeurs conservatrices qui expliquent à elles seules le succès du roman de terroir et le déclin de la SF à l'époque. Le roman de terroir qui a relativement peu d'équivalent à l'étranger et certainement pas chez les anglo-saxons. Un genre qui montre à lui tout seul le mépris d'une partie des Français pour le futur, les sciences, et la nouveauté.

dimanche 17 octobre 2010

Livre univers

Aujourd'hui la SF vend peu. Mais à coté de ça nous trouvons peu de blockbusters parmi les livres qui sortent. Et la grande majorité des blockbusters sont des livres univers. Les années 80 ont été une sorte de chant du cygne pour ce type de récits. C'est ainsi que la décennie a vu Héliconia de Brian Aldiss, le cycle de Majipoor de Robert Silverberg, Radix de AA Atanasio, Le Chant de la Terre de Michael G Coney, Inexistence de David Zindell sans oublier Hyperion de Dan Simmons qui conclue la période en apothéose . Et je ne parle pas des oeuvres non traduites chez nous. Paul Di Filipo évoque notamment le cycle des Starbridge Chronicles de Paul Park. Par contre les années 90 furent assez vide. Le seul véritable livre univers fut l'Aube de la Nuit de Peter F Hamilton. Les années 2000 furent légèrement plus frémissante, le cycle de Nulapeiron de John Meaney (que Jean Claude Dunyach avait envisagé de faire traduire en Français chez Bragelonne) ainsi qu'une trilogie de Jim Grimsley (The last green tree).
Chez nous en France ce furent les années 90 qui s'affirmèrent les années du livre univers. Ainsi nous vîmes se succéder Les Guerriers du Silence de Pierre Bordage, les cycles de Aqualia et de Yorg d'Alain le Bussy ou encore le cycle d'Omale de Laurent Genefort. On est en droit de se demander si ce n'est pas le livre univers qui dope le marché de la SF. Aujourd'hui qu'il est moins présent le genre vend moins. Par contre le livre univers fut la marque de la fantasy des années 2000 : Steven Erickson, China Mieville, Steph Swainson, David Anthony Durham, Patrick Rothfuss, Robert Reddick, Ken Scholes, Adrian Tchaikovsky, Brandon Sanderson, Mark C Newton et sans doute d'autres que j'oublie se sont tous illustrés dans la création de véritable livres univers. Tous les livres univers ne sont pas des blockbusters, mais quasiment tous les blockbusters des années 2000 sont des livres univers. Les français n'ont pas été en reste avec Mathieu Gaborit, Nicolas Cluzeau, Charlotte Bousquet ou Claire Panier Alix.
Il y a de quoi faire réfléchir. Et si le livre univers avait dopé les ventes de la SF. A coté de tels livres il y avait d'autres romans ou cycles qui développaient à leur manière la notion d'univers. Nous ne pouvons que nous réjouir de l'arrivée d'auteurs comme Neal Asher ou Tobias Buckell qui développent un imaginaire spatial flamboyant. Mais il est clair qu'il manque le niveau au dessus.
Le retour du livre univers marquera le retours en grâce de la SF. J'en suis intimement persuadé.