lundi 23 février 2015

Le renouveau des années 90

Le fameux renouveau qu'ont connu les littératures de l'imaginaire dans les années 90 s'explique aisément à travers la grille du dialogue entre les média. Les années 90 sont celles du dialogue avec le milieu du jeu de rôles. Comme je l'ai dit précédemment c'est le milieu du JDR qui s'est rapproché de la SF avec notamment les éditions Mnémos en 1995. Ont suivi Nestiveqnen, Science fiction magazine et aussi la revue Bifrost. Autant d'initiatives créées par des rôlistes. Les choses marchaient également dans l'autre sens puisque Roland C Wagner avait une rubrique de critiques de roman de SF dans Casus Belli, qui a permis à,des nombreux rôlistes de se construire une culture SF.
Les rôlistes ont aussi pesé dans le succès de certaines oeuvres. On sait que les Guerriers du silence de Pierre Bordage ont eu un très bon bouche à oreille dans le milieu des rôlistes et que ça a été un aspect déterminant du succès de l'oeuvre.

Mais dans les années 90 nous avons eu aussi des auteurs fans de comics au premier rang desquels Serge Lehman qui ne l'a jamais caché.

Les années 90 ont été des années de dialogue entre la littérature et les autres média. Ce dialogue s'est estompé dans les années 2000 et notamment après 2005. Si la fantasy a continué a dialoguer avec le JDR, la science fiction s'est recentrée sur elle même. Le dialogue s'est donc délité.
D'autres dialogues et notamment celui des littératures de l'imaginaire et de la culture geek se profile à l'horizon. Malgré les réticences des gens les plus conservateurs du fandom, cette forme de dialogue sera fructueuse espérons le, ramenant les littératures de l'imaginaire sur le devant de la scène.

dimanche 22 février 2015

Quand le dialogue fonctionne

Dans les années 80, la SF française a connu un petit phénomène : Serge Brussolo. Cet auteur a vite rassemblé autour de lui de nombreux lecteurs. Or Brussolo évolue dans une démarche de dialogue, celle de rapprocher la littérature SF et fantasy et le cinéma bis. Il est clair que Serge Brussolo a amené avec lui de nombreux lecteurs habitués du cinéma bis qui voyaient leurs univers être l'objet d'une littérature. Brussolo décontextualisait et recontextualisait les grands thèmes du cinéma bis. On peut citer par exemple ce qu'il a fait avec les Kaiju dans des romans comme Ce qui mordait le ciel ou encore Opération serrures carnivores. Mais il l'a fait avec d'autres thèmes chers aux bisseux et souvent plusieurs thématiques issues de ce cinéma sont reprises dans ses romans.
Brussolo a permis de créer un pont entre cinéma fantastique et SF et d'autres auteurs avec une démarche similaire sont arrivés plus tard dans les années 80 comme Michel Honnaker.

Ce qui veut dire que le dialogue entre littérature et autres média fonctionne ça permet d'avoir des littératures de l'imaginaire qui fonctionnent.

jeudi 5 février 2015

Dialogue dans la culture de l'imaginaire

Au début des années 80 en Grande Bretagne, les éditeurs de jeux de rôles sont venus dans les conventions de SF, montrer leurs produits. Certes c'était une démarche commerciale d'entreprise souhaitant conquérir un marché. Mais cela a aussi rapproché ces deux milieux. D'ailleurs dans le monde anglo-saxons les auteurs issus du jeux de rôles se sont fait connaître dans les années 80. En France c'est dans les années 90 avec la création de Mnémos que le milieu du JDR s'est rapproché de celui de la littérature de l'imaginaire. Et c'est principalement à l'initiative du fandom rôliste. Les initiatives dans l'autre sens étaient plus rares. L'on se souvient de la rubrique inspi de Roland C Wagner dans Casus Belli. Mais à part ça c'était un peu désert. Certes les premiers auteurs issus du JDR sont arrivés plus tard chez nous. Mais que les rôlistes n'étaient pas considérés comme un public intéressant par la plupart des éditeurs c'est assez symptomatique. Il n'y avait guère que Jacques Goimard chez Pocket qui à l'époque avait ouvert grand la port à la fantasy, comprenant le potentiel de ce public. Et il s'est pris une volées de bois vert.

En Grande Bretagne le magazine de BD, 2000AD a inspiré tout une génération d'auteurs, de James Lovegrove à Andy Remic en passant par Richard Morgan, Simon Green, Jon Courtnay Grimmwood, Neal Asher, Richard Calder et quelques autres. En France Métal Hurlant, pourtant magazine emblématique ne donnera pas une école foisonnante de SF punk, rock'n roll, mystico violente.... Certes il y aura Jean Marc Ligny ou Roland C Wagner et deux ou trois autres. Mais ça ne constituait pas une vague de fond. Au contraire à cette époque au lieu de dialoguer avec les lecteurs de Métal Hurlant, l'on lance le groupe Limite, ce que la SF française a donné de plus intellectuel à ce jour. Il faudra attendre 1993 pour voir un cycle univers commencer à paraître ( les Guerriers du Silence de Pierre Bordage) alors que le début des années 80 avait vu paraître l'Incal dans les colonnes de la revue de Jean Pierre Dionnet.


En France on sacralise trop la littérature et on ose pas trop dialoguer avec les autres médias. C'est dommage.

mercredi 4 février 2015

Imaginaire et culture populaire

Steve Davidson écrivait dans Amazing Stories que les littératures de l'imaginaire formaient le coeur de culture populaire dans le monde occidental. Et si l'on est un tant soit peu attentif à notre environnement culturel, on se rend compte qu'en France ce n'est pas le cas. Ca vaut la peine de réfléchir à ce qui est le coeur de la culture populaire en France. Aujourd'hui il s'agit du genre policier. D'ailleurs c'est reconnu largement par les spécialistes de culture en France. Si l'on regarde bien c'était déjà le cas dans les années 70, même si la SF était en phase ascendante à l'époque. Mais entre 1979 et 1995, nous avons vécu une période étrange pendant laquelle le roman de terroir est devenu le coeur de la culture populaire. Tout d'abord Denis Tillinac crée l'école de Brive, pour diffuser une littérature populaire véhiculant des valeurs conservatrices et réagir ainsi contre le roman noir et la SF jugés trop à gauche. Mais derrière le succès du roman de terroir il y a aussi l'utopie du retour à la terre qui a permis à de nombreux jeunes urbains de changer de vie en s'installant comme agriculteur. C'est le télescopage de ces deux éléments qui a permis à ce genre de devenir énorme. Les éditeurs ont créé leurs collections, les small press régionales se sont multipliées. Avec en filigrane, la quête d'identité, et surtout le retours vers la tradition et le refus de la modernité.
Dans les années 80 aussi bien la SF que le polar fonctionnent assez mal. C'est la culture ruraliste qui va devenir pour une quinzaine d'années le centre de gravité de la culture populaire avant que le polar reprenne sa place.
L'imaginaire malgré les efforts des éditeurs spécialisés dans les années 90 n'a pas pu prendre cette place. Après 15 années de contre-temps le status quo s'est réinstallé. D'autant que peut être le fandom a insuffisamment joué la carte du dialogue avec les autres média ( mais cela j'en parlerais dans mon prochain article).

mardi 3 février 2015

Imaginaire et contre culture

La culture de l'imaginaire est étroitement liée à la contre - culture. Mais la contre culture en France est différente de la contre culture américaine. Elle s'est développée plus tard déjà. La contre culture chez les Anglo-saxons est née dans les universités. En France les universités se sont développées assez tard. En 1975 il n'y avait que 9% d'une classe d'âge qui accédait au baccalauréat. C'est donc dans les années 80 que l'université s'est démocratisée. De plus le système français se caractérise par sa dualité universités / grandes écoles. Et il est clair que dans certaines grandes écoles, notamment les écoles de commerce, la contre culture a eu plus de difficultés à percer. Par contre il est vrai que certaines les écoles d'ingénieur entre autres ont vu se développer des activités autour du jeu de rôle ou de la bande dessinée et sont devenues assez vite des creusets pour cette contre culture.
Aux USA, c'est Berkeley qui a été le berceau de la contre culture, une université publique qui accueillait des étudiants issus de la classe moyenne et même des milieux plus modestes. En France c'est l'école normale supérieure de la rue d'Ulm qui a joué ce rôle. On sait notamment que ce vénérable établissement a eu un rôle dans la diffusion du jeu de rôles en France. Nous sommes en présence d'une des écoles les plus élitiste de notre modèle républicain (et en plus un établissement parisien), où certes l'on trouve des étudiants venus de la classe moyenne mais beaucoup plus de la classe moyenne supérieure ou de la classe aisée. Ce n'est donc pas le même public qui a contribué à diffuser cette contre culture.
La contre culture doit aussi beaucoup aux villes ouvrières dans le monde anglo-saxo : Chicago et Detroit pour les USA, Manchester et Liverpool pour la Grande Bretagne. Nous n'avons pas eu l'équivalent. Par contre en France la contre culture a été vite récupérée par les milieux d'extrême gauche et le Larzac a été aussi bien un foyer de contestation politique que culturelle. D'un coté nous avons l'utopie d'enfants d'ouvriers qui souhaitent intégrer les classes moyennes et qui pensent avoir une chance d'y parvenir au moyen de l'art et de la culture et de l'autre ( en France) l'utopie du retour à la terre. Il est clair que le sens est différent. Mais je reviendrais à ce dernier point dans mon prochain billet.